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Pourquoi « Les tisserands » ?

Pourquoi « Les tisserands » ?

Tisser.

Entrelacer, entrecroiser les fils pour produire un tissu ou une tapisserie.

Former un réseau, élaborer, organiser.

Etablir, créer des liens, des relations entre les personnes.

J’ai compris très tôt qu’il est impossible de survivre sans être lié à d’autres. Encore plus quand on est fragile, qu’on ne dispose pas de capital économique et culturel hérités. Cette expérience de vie fait que j’ai toujours agi en réseau, en collectif.

Dans mon métier. Les élèves de lycée professionnel sont essentiellement issus des classes populaires. Dès le moment où ils doivent chercher un stage, ils sont confrontés à la question du réseau, ou plutôt de son absence. J’ai développé depuis quinze ans une pédagogie basée sur le lien et la confiance. J’ai observé très tôt qu’il était nécessaire d’être bien dans une classe, donc dans un collectif, bien dans le climat d’une salle de cours pour pouvoir entamer un apprentissage. Que pour apprendre, il faut se tromper. Et on accepte de tomber quand on le fait dans un climat de confiance et qu’on sait que plusieurs mains sont disponibles pour se relever. Par contre, tomber sans filets, en se sentant éliminé dans une logique de concurrence, génère de la violence. Dans la pédagogie du lien et de la confiance, l’enseignant est en posture de médiation, d’élaboration d’un collectif pour permettre la transmission du savoir au service de l’émancipation.

Dans mon engagement. La première chose que j’ai faite en tant qu’élue a été de mettre en réseau les acteurs du territoire, d’abord sur les questions de jeunesse, puis désormais sur les questions de culture. Réseaux de partage d’informations, de pratiques, de coups de main. Réseaux de projets, de solidarité. De ces mises en réseau sont nés des projets déployés sur le territoire du 20e qui ont créé du lien entre habitant-e-s. Là aussi, la posture de l’élue doit être dans la médiation et la facilitation. Cela modifie profondément la question du rapport au pouvoir, à sa conquête et à son exercice.

Depuis quelques années, j’accumule dans des carnets des notes de lecture, des réflexions après des rencontres, des morceaux de textes sur des convictions politiques, sur mon cheminement personnel. J’ai toujours eu en tête d’en faire quelque chose, de le partager. C’est la première fonction de ce blog.

Tisserand

            Ouvrier, ouvrière qui fabrique les toiles et les étoffes au métier à tisser traditionnel.

            Artisan, créateur d’œuvres tissées dont il assure le dessin et la réalisation

            Famille d’oiseaux de l’ordre des Sylvains

            Titre du livre d’Abdennour Bidar, philosophe, liant réflexion politique et spirituelle, encourageant à recréer trois liens : le lien à soi, avec notre moi profond, le lien de fraternité et de coopération avec les autres, le lien d’émerveillement et de méditation à la nature, en vue de ré enchanter le monde.

Dans un contexte difficile, avec beaucoup de tensions, d’inquiétudes, de doutes, tout espace de débat collectif est bon à créer.

Contexte difficile tant les alertes concernant notre planète sont alarmantes : pollutions des sols, pollution de l’air que nous respirons, réchauffement des océans, déclin de la biodiversité…

Et pourtant… Nos sociétés continuent de faire reposer leur développement sur l’exploitation des ressources limitées qui s’épuiseront un jour. La prédation toujours plus importante de ces ressources fonde le capitalisme, qui ne peut donc être une solution pour notre avenir. C’est pourquoi il est urgent de cesser le déni et l’immobilisme : nous devons changer de système et faire de l’écologie le nouvel horizon du progrès.

Contexte difficile dans un monde de plus en plus complexe. Les conservateurs gagnent des positions de pouvoir politique et les utilisent aux détriments des plus pauvres et des plus fragiles. Observons l’obsession de Donald Trump à construire un mur entre les Etats-Unis et le Mexique. Observons son obsession à séparer les familles, à expulser les migrants. Comme s’ils étaient la cause des problèmes aux Etats-Unis. Comme si expulser quelques centaines d’hommes et de femmes allait solutionner le changement climatique, la pauvreté et le travail précaire, les discriminations.

Contexte difficile et période étrange que nous vivons, où la démocratie est remise en doute en permanence. Pourtant, la soif de se faire entendre, de proposer, d’inventer des formes nouvelles d’implication citoyenne n’a jamais été aussi forte. Quand on y réfléchit un peu, il n’y a pas plus inhospitalier qu’un rond point autour duquel tournent les voitures individuelles et les camions. C’est étrange qu’un rond point devienne une place publique, accueille des temps de convivialité et des moments d’échanges politiques.

Contexte difficile de mobilisations pour la justice sociale et fiscale. Ces dernières années, ceux et celles qui vivent de leur travail ont vu leur pouvoir d’achat diminuer. Les fins de mois sont devenues encore plus difficiles, l’angoisse de ne pas pouvoir faire face à une dépense imprévue encore plus forte, l’avenir pour ses enfants encore plus incertain. Et dans un même temps, l’enrichissement des plus riches est toujours plus exponentiel, sans que le collectif profite de cette augmentation de richesses.

Dans ce contexte difficile, il est urgent de ré enchanter. De tisser, de faire du commun, de faire le pari des alternatives. En commençant par là où nous habitons, là où nous nous investissons, dans le 20e, là où nous découvrons chaque jour des luttes, des initiatives, des solidarités.

D’être des tisserands. D’avoir conscience de notre force, de notre nombre, et de « l’ampleur de la grande réparation du monde humain » que nous avons commencée.

NathalieMaquoi
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