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Les Tisserands du 20e – Episode 2 : Ceux et celles qui font vivre la mémoire de la Commune de Paris.

Les Tisserands du 20e – Episode 2 : Ceux et celles qui font vivre la mémoire de la Commune de Paris.

J’ai reçu hier en rendez-vous à la mairie l’association « Faisons vivre la Commune » qui prépare le 150eanniversaire de la Commune de Paris en 2021. 72 jours de débats, de spectacles, de convivialité, de partage pour (re)découvrir cet événement souvent absent de l’histoire scolaire. 72 jours pour inventer une Commune sur les héritages de celle de 1871 : les idéaux de démocratie et de progrès social.

Le soir, je me retrouve à raconter à N. et O., 20 ans tous les 2, la Commune de Paris. Ils sont engagés en faveur des jeunes mineurs isolés. La Commune leur parle, même s’ils ne connaissent pas bien. Ca m’a donné envie d’y revenir car elle est source d’inspiration pour tous les Tisserands.

Un siège de Paris de plusieurs mois qui touche durement la population.

Le 4 septembre 1870, Léon Gambetta, député de Belleville depuis 1869, se rend à l’hôtel de Ville pour annoncer la chute de l’empire et proclamer la République, suite à la défaite militaire de Napoléon III devant la Prusse. Les Prussiens commencent le siège de Paris le 18 septembre 1870. Gambetta refuse de capituler et déclare la patrie en danger. La population parisienne est privée de ravitaillement, réduite au chômage, soumise aux bombardements incessants des canons prussiens.

Fin janvier 1871, le gouvernement de Défense nationale signe l’armistice avec la Prusse. Une des conditions est d’organiser des élections législatives. Les monarchistes, partisans de la paix, l’emportent largement sur les républicains, forts du soutien massif des électeurs ruraux. Le fossé entre ville et campagne n’a jamais été aussi profond. Cette domination des « ruraux » se traduit par une mesure symbolique : la décapitalisation de Paris.

Une défaite humiliante pour les Parisiens, profondément républicains.

Le 26 février 1871, le traité de paix permet à la Prusse d’annexer l’Alsace et la Moselle, impose une indemnité de guerre de 5 milliards de francs or. Les Parisiens ressentent ce traité comme une immense humiliation et une trahison, renforcées par l’autorisation donnée aux vainqueurs de défiler sur les Champs-Elysées le 1ermars. 

Dans un même temps, une des premières mesures de l’Assemblée constituante nouvellement élue est de supprimer l’indemnité due à la garde nationale, cette force citoyenne armée. A Paris, la Garde nationale, c’est 250 000 hommes issus de toutes les classes sociales, recrutés et organisés par quartiers, qui élisent leurs chefs.

Le 18 mars 1871, le peuple parisien se soulève contre le nouveau pouvoir et chasse l’armée de Paris, venue reprendre sous l’ordre de Thiers les 227 canons financés par les Parisiens. C’est le début de la Commune.

72 jours révolutionnaires réactivant la conception populaire de la citoyenneté fondée sur la démocratie directe et l’autonomie communale.

Les bataillons de la Garde nationale se réunissent en une fédération. Son comité central proclame la « Commune de Paris » (en mémoire du nom de la municipalité pendant la Révolution française), dans l’opposition totale à un pouvoir central délégitimé. 

La Commune de Paris dure 72 jours. Multitudes de clubs et de journaux ressurgissent, les réunions sont quotidiennes pour voter des motions transmises aux nouvelles autorités. Dans ces clubs, tous et toutes peuvent prendre la parole, homme comme femme. C’est important de le préciser car l’Union des femmes pour la Défense de Paris peut être considérée comme la première organisation féministe de masse, défendant le droit au travail des femmes, l’égalité salariale, défendant Paris sur les barricades. 

Les élections pour désigner les 79 membres du conseil de la Commune ont lieu le 26 mars. Elles mettent en lumière le net clivage social au sein de Paris depuis le nouvel urbanisme d’Haussmann entre les beaux quartiers de l’Ouest (parti de l’ordre) et les quartiers populaires du centre et de l’Est (républicains, socialistes, anarchistes). 

Parmi les élus, des ouvriers, des enseignants, des journalistes, des avocats, des artistes. Les représentants des ouvriers sont majoritaires. Ils adoptent un grand nombre de mesures confortant la démocratie directe : droit à l’insurrection, élection des fonctionnaires et des juges, contrôle permanent des citoyens sur les élus par le principe de révocation, séparation de l’Eglise et l’Etat. 

Dans l’idéologie de la Commune, l’autonomie municipale est importante : Paris veut être libre et se gouverner par soi-même. La Commune de Paris serait la première pierre d’une République sociale fédérant des villes libres.

Les Fédérés réquisitionnent les lieux de production et en confient la gestion aux ouvriers : les coopératives ouvrières sont ainsi encouragés. Les salaires des instituteurs sont doublés, pour une école qui devient obligatoire, gratuite et laïque. La gratuité des loyers envisagée pour quelques mois. La citoyenneté est donnée aux étrangers. L’union libre par consentement mutuel est reconnue.

La Commune achevée par la semaine sanglante

Adolphe Thiers, chef du gouvernement, bénéficie du soutien de Bismarck pour réprimer la Commune. Le 21 mai, 130 000 militaires entrent dans Paris. 900 barricades sont dressées dans les quartiers populaires, mais de nombreuses défections dans la garde nationale ont lieu dans les quartiers de l’ouest. 

C’est la semaine sanglante, la Commune est vaincue. Plus de 20 000 communards sont morts, 43 000 arrêtés, 10 000 condamnés, une centaine à la peine capitale, 3800 à la déportation en Nouvelle-Calédonie. Ceux et celles qui comparaissent sont à 85% des travailleurs manuels, issus en général de petites entreprises.

L’hommage aux Communards tous les ans au Père Lachaise

Paris est placée en état de siège jusqu’en 1876. A partir de 1876, les militants se rassemblent devant le mur des Fédérés du cimetière du Père Lachaise, lieu de l’ultime bataille où les derniers communards se sont retranchés et ont été fusillés et jetés dans une fosse commune. 

Jusqu’à aujourd’hui, un samedi de la fin mai, nous nous retrouvons fédérés par les Amis et Amies de la Commune de Paris pour se souvenir du rôle majeur de la Commune dans la construction d’une nouvelle mémoire ouvrière. On y chante L’Internationaleet le Temps des Cerises,écrites par des communards. On y croise tous ceux et celles qui dans le 20efont vivre les idéaux de la Commune.

Ceux et celles qui accueillent les migrants. Ceux et celles qui soutiennent les services publics. Ceux et celles qui continuent d’inventer le modèle coopératif. Ceux et celles qui dans leurs salles de classe tous les jours œuvrent pour une éducation émancipatrice.

NathalieMaquoi
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